Conversation avec Maya Mouawad et Cyril Laurier, duo d’artistes engagés sur les enjeux écologiques.

March 3, 2025
Maya Mouawad et Cyril Laurier
Maya Mouawad et Cyril Laurier

Dans le cadre de nos rencontres avec les talents inscrits sur la plateforme The Caring Gallery, nous avons eu le privilège d'échanger avec Maya Mouawad + Cyril Laurier. Ce duo d’artistes engagés sur les enjeux technologiques et écologiques nous livre leur vision du dialogue entre art et entreprises.

 

MOUAWAD ET LAURIER.
Un duo d’artistes visionnaire mêlant art, technologie et engagement écologique. Cyril Laurier et Maya Mouawad explorent les liens entre innovation technologique, réflexion sociétale et nature. Fascinés par la manière dont les outils technologiques peuvent reconnecter l’humain à sa vulnérabilité et à l’environnement, leurs créations allient émotions, contemplation et sensibilisation. 

 

Exemples de leurs collaborations passées avec les entreprises :

- Ruinart
- BNP Paribas
- Learning Planet Institute
- La Fondation OVE

 


 

Pouvez-vous nous parler de votre parcours et de ce qui vous inspire dans votre travail ?

Nous venons tous deux d’une école d’ingénieurs orientée multimédia, où nous avons découvert les ponts fascinants entre art et science. Nos débuts ont été marqués par l’intelligence artificielle et la musique, puis notre démarche a évolué pour mêler technologie et écologie. Ce qui nous fascine, ce n’est pas la technologie en soi, mais son potentiel pour nous reconnecter à la nature et à notre propre vulnérabilité.

 


 

Quelles causes défendez-vous à travers vos œuvres ?

Nous sommes fascinés par la manière dont la technologie peut captiver les gens, mais nous pensons que l’essentiel réside ailleurs : dans la contemplation d’un arbre, d’un écosystème, de ce qui est vivant et vulnérable. Nous utilisons la technologie pour recentrer le regard sur la nature et sa richesse. 

“ La technologie pour regarder la nature.”

Nos œuvres abordent des thèmes comme la montée des eaux ou la fragilité des ressources naturelles. À travers elles, nous cherchons à reconnecter l’humain à son environnement et à initier des discussions collectives. Elles servent également à s’interroger sur les impacts de la robotisation, non pas en tant que menace technologique, mais en termes d’aliénation humaine. Notre approche artistique explore donc le lien entre déconnexion avec la nature, perte de vulnérabilité, et capacité d’agir collectivement.

 


 

Avec quelles entreprises avez-vous déjà collaboré ?

Nous avons eu plusieurs collaborations enrichissantes avec des entreprises comme Ruinart, BNP Paribas ou The Learning Planete Institue. 

“Chez Ruinart, nous avons eu carte blanche pour créer une œuvre immersive qui intégrait la question du changement climatique.” 

Nous avons réalisé ce projet sur deux ans, dans les crayères de Ruinart classées au patrimoine mondial de l’UNESCO, à 30 mètres sous terre. Pour nous ce lieu évoque à la fois fragilité et éternité, et nous a inspiré l’exploration de la vulnérabilité humaine face à la nature. L’installation que l’on a conçue intègre des lampes contrôlées par un système électronique et d’intelligence artificielle, réagissent aux conditions météorologiques pour transmettre des émotions telles que l’angoisse ou la sérénité. Tout le dispositif technologique est dissimulé, permettant aux visiteurs de se concentrer sur l’expérience émotionnelle et contemplative. Cette œuvre allie technologie, art et poésie pour créer un moment profondément immersif et marquant. Ce projet nous a vraiment permis d’introduire des thématiques environnementales tout en restant fidèles à notre démarche artistique.

 

L'oeuvre Retour aux sources, installation permanente visible lors de la visite des caves chez Ruinart à Reims. © Easy.barcelona

“Avec BNP, nous avons conçu Peupler, une installation immersive qui interroge notre relation aux espaces naturels et bâtis.” 

Conçue pour leur siège de l'entreprise, cette œuvre questionne notre manière de « peupler » la Terre, en opposant la destruction des forêts pour construire des bâtiments à la reconnaissance de l’interdépendance entre les humains et les autres formes de vie. Initialement pensée pour susciter des réflexions internes chez BNP, l’œuvre a trouvé un rayonnement international en étant présentée à la Biennale de Venise et à la Biennale d’art contemporain de Dakar. 
 
Peupler, oeuvre immersive, interactive, musicale et olfactive. © Marie Flament

“A l’occasion de la Nuit Blanche à Paris, nous avons présenté Rising, une œuvre immersive centrée sur la montée des eaux.“

Au Learning Planet Institute,  en partenariat avec The Caring Gallery. C’est. Elle utilise des lampes spécifiques, similaires à celles développées pour d'autres projets, pour explorer des effets et reflets aquatiques. Ce projet artistique vise à susciter des discussions sur ce sujet crucial, sans imposer de message direct. 
 

 Rising, installation immersive en extérieur alliant son et lumière. © Hugo Lafitte


 

Quel impact, selon vous, ces collaborations ont-elles eu sur les entreprises ?

Chaque collaboration est unique. Les impacts varient selon les projets et les entreprises. 
Par exemple, concernant la collaboration avec Ruinart notre travail a alimenté des discussions autour de l’écologie chez les visiteurs, tant au sein de leurs équipes qu’auprès du groupe LVMH. L'œuvre rappelle aux spectateurs l’insignifiance humaine face à l’immensité du temps et de la nature, suscitant parfois des émotions intenses, comme des larmes. Au sein du Groupe, cela a encouragé une réflexion autour de l’écologie et sur leurs pratiques, comme l’évolution de leurs packagings vers des solutions plus durables.

 

 “Chez Ruinart, nous avons introduit la question du changement climatique, qui a résonné avec leurs préoccupations autour des vendanges et du packaging. Cela a ouvert des discussions au sein du groupe LVMH et donné une nouvelle portée à leur démarche.”

Chez BNP, notre installation immersive a suscité des questions parmi les collaborateurs, notamment sur la manière dont les espaces bâtis peuvent cohabiter avec la nature. Ces collaborations sont une opportunité d’amener des sujets complexes dans des environnements professionnels, souvent avec des retours émotionnels et intellectuels très positifs.

 

Pour le projet Rising cela a permis d’amener le débat sur la montée des eaux dans un cadre enrichissant et de provoquer des échanges entre experts, artistes et spectateurs. La discussion a eu lieu avec des gens qui connaissent le sujet, mais sous un autre angle. Le fait, lors d'une inauguration, de créer comme événement satellite à la présentation d'une œuvre pour créer un moment de débat et de discussions autour du sujet; je trouve que c’est très enrichissant, à la fois pour les spectateurs et pour nous, artistes.

 


 

Comment vous assurez-vous d’arriver à partager vos valeurs et celles de l’entreprise ?

C’est un équilibre subtil que nous cherchons à atteindre dans chaque collaboration. Avant de nous engager, nous prenons le temps d’évaluer si les valeurs de l’entreprise résonnent avec les nôtres. Parfois, cela se fait naturellement à travers des rencontres humaines qui révèlent une volonté partagée d’agir positivement. Nous veillons aussi à garder une liberté artistique totale. Par exemple, chez Ruinart, nous avons pu aborder la question du changement climatique de manière audacieuse, même si ce n’était pas un sujet initialement central pour eux. En retour, leur ouverture nous a permis de co-construire un projet aligné avec nos convictions. Cela dit, il nous arrive aussi de refuser certaines collaborations lorsque nous estimons qu’un partenariat ne serait pas cohérent avec notre démarche engagée. 

 


 

Comment la plateforme de The Caring Gallery peut-elle faciliter ce type de collaboration ?

La plateforme peut jouer un rôle clé  en tant qu’intermédiaire en créant des passerelles entre artistes et entreprises. On a besoin de se rencontrer, de se parler, d'essayer de comprendre ce qui se passe. L’importance d’un filtrage préalable nous semble crucial pour s’assurer que les entreprises partenaires partagent des valeurs et des objectifs compatibles avec notre démarche artistique. Ce rôle d’intermédiaire, souvent joué par des curateurs ou des experts du monde artistique, doit permettre de créer un dialogue constructif et d’expliquer les intérêts communs des deux parties. 
Pour nous, la plateforme est un outil précieux pour initier des projets qui respectent nos engagements artistiques tout en répondant aux besoins des entreprises. Nous pensons qu’il y a la nécessité de clarifier dès le départ que le processus artistique diffère des commandes classiques à des agences de communication. La plateforme pourrait ainsi éviter les malentendus, notamment en expliquant que les œuvres ne sont pas des produits livrables avec des allers-retours, mais le fruit d’une démarche artistique singulière.

“La plateforme pourra permettre de structurer la collaboration, de clarifier les attentes et de garantir un alignement des valeurs.”


 

Quels projets souhaiteriez-vous développer avec les entreprises via la plateforme de The Caring Gallery ?

Nous voulons continuer à collaborer avec des partenaires engagés sur des projets qui allient innovation artistique et impact sociétal. Ce que l’on apprécie c'est la rencontre avec un univers, et nous aimerions notamment des collaborations qui nous permettent de découvrir de nouveaux univers, métiers ou savoir-faire, souvent inaccessibles autrement. Par exemple le CERN (organisation européenne pour la recherche nucléaire), la recherche spatiale, la haute-couture, la danse. En somme des entreprises où l’aspect artisanal, technologique ou innovant est central et qui regroupe des personnes passionnées par leur métier. Nous espérons par exemple développer des résidences participatives, des conférences ou encore des expositions.

 

Propos recueillis par Elodie Cans. 


 

Envie d'en savoir plus sur la plateforme de mise en relation entre entreprises et artistes engagés, développée par The Caring Gallery ?

 

 

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